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RP 2016-4 Petite histoire du concept « adidactique »

Vendredi, 1 juillet 2016 | 13 199 vus
Petite histoire du concept ‘adidactique’ Guy Brousseau Mon premier ouvrage, chez Dunod en 1965, (1) est uniquement composé de petits dessins qui suggèrent aux élèves et aux enseignants ce qu’ils peuvent faire. Aucun terme de mathématiques ne figure dans le texte et les exercices devaient pouvoir être résolus sans « explications » verbales avec des termes nouveaux pour les enfants. Le nom des signes peut être utilisé immédiatement mais les définitions et les explications viendront plus tard. Ce manuel est clairement un recueil de situations formellement a-didactiques. Le mot ne sera prononcé que beaucoup plus tard. Mais des justifications de cette tentative de « mathématiques sans paroles » devraient pouvoir être trouvées chez des auteurs de l’époque. Ils montrent que, déjà, certains mathématiciens étaient conscients que les explications et les exposés de « mathématiques modernes » nécessaires aux professeurs, allaient provoquer une inflation d’explications, de métaphores, de commentaires dans leur enseignement lui-même. Ils allaient alourdir et encombrer inutilement l’enseignement lui-même et les apprentissages des élèves. Ce projet n’a pas pu suivre son cours. C’était une époque où tous les progrès semblaient menacer la culture et la langue : les demandes pressantes d’enseigner la langue des signes aux enfants sourds-muets, directement, dès que possible, étaient rejetées violemment : Il fallait leur apprendre à lire sur les lèvres et dans les livres et surtout à se taire ! Car la LANGUE était en danger. Dans ce projet, il ne s’agissait pas de faire agir les enfants comme des muets mais de pouvoir dire d’abord les choses dans leur langage, quitte à proposer la formulation canonique dès que la pensée est correctement appropriée. Quoi la pensée avant le mot ?  Les lettrés protestèrent contre cette hérésie : Pas de pensée sans langage ! Ce qu’ils interprétaient en fait par : « l’individu x n’a pas de pensée en dehors de ce que A peut exprimer » (A pour Académicien bien entendu). Le dernier ... Lire la suite